C’est la saison du glyphosate ! Ce 16 novembre, l’Union européenne vient de réautoriser pour dix ans supplémentaires le désherbant qui contamine la planète entière, pollue l’eau, participe à la chute de la biodiversité, est lié à des pathologies comme le cancer ou à des atteintes au système nerveux des enfants quand leur mère y a été exposée. Pendant ce temps, les habitants du Morvan assistent au défilé des camions de sapins massivement traités aux produits chimiques, qui partent approvisionner les magasins.
Adret Morvan constate atterrée que le gouvernement français a refusé de voter pour l’interdiction du glyphosate et a préféré s’abstenir. Elle constate tout aussi atterrée qu’aucune mesure sérieuse n’a été prise localement pour éradiquer son usage en Morvan, prétendu « parc naturel » qui produit un million de sapins, le quart de la production nationale.
Si interdire l’usage des pesticides, herbicides et autres produits chimiques ne relève pas des institutions locales, au moins pourraient-elles s’abstenir de l’encourager : le principal lobby du sapin de noël, 15 entreprises qui fournissent 60 % de la production locale a son adresse au siège du Parc naturel régional.
Alors qu’il existe des alternatives, alors que les sapins de Noël ne sont pas indispensables à notre survie, contrairement à l’eau, aux sols, à l’air que leur culture empoisonne, la filière continue de bénéficier d’aides locales, régionales et nationales. La bonne santé économique d’une centaine de producteurs passe avant la santé tout court de 70 000 habitant.es du Morvan et d’ailleurs, sans compter les autres conséquences néfastes de cette activité telle que pratiquées aujourd’hui : emploi précaire, accaparation de terres agricoles qui devraient assurer l’autosuffisance alimentaire locale, destruction du tissu économique, social et culturel diversifié au profit de monocultures industrielles, etc.
Quand six des neuf limites planétaires ont été franchies, dont celle de la pollution chimique à laquelle contribue le glyphosate et ces dernières semaines celle de l’eau douce, quand une seule commune du Morvan est épargnée par les pesticides utilisés en agriculture, il ne s’agit plus de “diminuer”. Il faut le stopper complètement et Adret Morvan soutient toutes les initiatives qui vont dans ce sens.
Si nous avons informé de l’appel à manifester le 17 novembre chez le producteur qui fournit le sapin de l’Élysée, nous ne pouvons en revanche nous associer au texte qui est joint à cet appel, parce qu’il désigne comme responsables les élus, les syndicats, les fonctionnaires, comme si tous se valaient. Tous ne se valent pas et nous, citoyens, ne pouvons pas nous exonérer de notre responsabilité. C’est bien nous qui avons élu, réélu, laissé réélire les responsables. Quant aux fonctionnaires, ils appliquent les directives, ce qui est tout à fait normal. Le texte d’appel à manifester renvoie également à des responsabilités extérieures (“le véritable ennemi est ailleurs”), alors que les sapins sont bien produits en Morvan, par des entreprises locales. C’est pourquoi :
- Adret Morvan appelle les habitantes et les habitants à participer massivement au débat sur les pesticides, de façon que cette question et plus globalement celle de la crise écologique à laquelle nous devons faire face, reste au cœur des priorités des prochains scrutins. Ils peuvent par exemple s’informer en venant nous rencontrer lors des permanences organisées au Carrouège chaque samedi en fin d’après-midi, en consultant l’étude de Agir pour l’environnement que nous avons relayée l’an passé, démontrant que 85% des sapins sont contaminés, l’Atlas des pesticides dans l’agriculture ou encore en écoutant les témoignages de victimes comme dans cette émission publiée le 15 novembre sur Mediapart.
- Nous rejetons le discours propagé par le lobby de la filière selon lequel il n’existerait pas d’alternative. C’est faux. Outre le désherbage mécanique, il est possible d’allier la culture des sapins de Noël à l’élevage de certains moutons qui se nourrissent entre les arbres sans les abîmer.
- Nous saluons les trois producteurs bios du Morvan (dont vous trouverez les adresses ici), ainsi que ceux qui ne se sont pas déclarés comme tels mais n’utilisent aucun produit chimique. Ils sont malheureusement extrêmement minoritaires. Ce sont eux qui devraient bénéficier des locaux, des aides publiques et de la médiatisation.
- Nous refusons de nous contenter de l’étiquette d’un label sur les sapins comme preuve de leur innocuité, puisque le label autorise le glyphosate. Nous attendons donc des producteurs qu’ils déposent en mairie les informations sur les substances qu’ils utilisent, incluant les quantités et dates d’utilisation, et que ces informations soient transmises aux habitants par les communes. Nous attendons des maires qu’ils facilitent cette transparence.
Au minimum, si les producteurs se retranchent derrière la légalité de leurs pratiques, la population a le droit de se protéger.