Été chaud entre La Bresseille et le CNPF

L’été fût chaud entre le CNPF (Centre national de la propriété forestière) et l’association La Bresseille.

En effet l’association dénonce avec force une coupe rase en Natura 2000, en pente, sur un site historique, dans un périmètre grand site de France et dans le PNR Morvan, le tout validé par le CNPF (Centre national de la propriété forestière).

Ce cumul de pseudo protection illustre bien la stratégie indigente de l’État français pour la forêt française. Natura 2000 impose très peu de contraintes à l’exploitation forestière, Grand site de france et PNR sont des labels à visées plus touristiques qu’écologiques, les sites historiques non inscrits ne sont jamais pris en compte dans les interventions et le CNPF applique une loi qui autorise tout et n’importe quoi. Il se retranche derrière le Schéma régional de gestion sylvicole (SRGS) qu’il se doit d’appliquer. Certes, mais c’est bien le CNPF qui tient la plume lors de la rédaction des SRGS… Il est d’ailleurs en cours d’actualisation et les associations ont du mal à faire valoir leur point de vue.

A noter que la définition de mélange du CNPF est

En suivant le communiqué de La Breseille et celui du CNPF.

Communiqué de l’association La Breseille (8 août 23)

Non, la gestion de la forêt du Foudon n’est pas « raisonnable »

Suite à notre campagne d’affichage dénonçant la coupe rase d’une parcelle de feuillus au lieu-dit « Le Foudon » à Villapourçon (Nièvre) , le CNPF (Centre National de la Propriété Forestière) a publié récemment un communiqué. Pour cet organisme, la gestion de cette forêt est « raisonnable » et notre communication « injustifiée ». Les arguments avancés sont loin de nous convaincre et voici pourquoi :
. La parcelle de feuillus visée par notre affiche est située dans une zone en forte pente au-dessus d’une rivière. Or dans son rapport remis en 2021, le conseil scientifique du Parc Naturel Régional du Morvan préconise d’exclure la pratique de la coupe rase sur ce type de terrain en raison du risque érosif. IL est aussi conseillé de ne pas recourir à la mise en place d’andains car cela « transfère la partie la plus riche du sol et conduit en plus à des atterrissements en bas de versants ». C’est pourtant ce qui a été fait.

. Le CNPF justifie la coupe rase de plusieurs hectares de feuillus au motif qu’il s’agissait d’un peuplement de « médiocre qualité sylvicole ». Pourtant de nombreux forestiers pratiquent l’enrichissement de leur propriété sans avoir recours à une méthode aussi radicale que la coupe rase.

. La parcelle a déjà été replantée, contrairement à ce qu’indique le CNPF. Une petite partie en châtaigniers et une part majeure en douglas. Avec la chaleur, de nombreux plants de résineux dont l’installation a été subventionnée par l’état sont déjà morts.

. La parcelle se situe dans une zone Natura 2000. Ce dispositif mis en place au niveau européen est censé protéger les habitats et espèces représentatifs de la biodiversité. À l’évidence, mettre un terrain à nu est contraire à cet objectif.

. Le chemin qui borde la parcelle est une ancienne voie romaine. Il a été saccagé pendant les travaux mais remis en état selon le CNPF. En fait, le chemin a été arasé et les pierres qui constituaient le socle ont été poussées sur les côtés. La voie a donc définitivement perdu son caractère historique.

. Le CNPF insiste longuement sur la nécessité qu’il y avait de couper une petite partie de la forêt composée d’épicéas « scolytés ». Comme si notre association s’opposait aux coupes sanitaires. Nous sommes bien conscients que dans ce cas – c’est le seul – il n’y a pas d’alternative à la coupe à blanc. Nous savons aussi que cet insecte ravageur se développe particulièrement dans les monocultures de résineux, un mode de sylviculture qui révèle aujourd’hui sa grande fragilité et qui a été longtemps soutenu par le Centre National de la Propriété Forestière.

Selon le CNPF, « Tout a été fait dans les règles ». C’est le seul point sur lequel nous sommes d’accord. Et c’est bien là le problème. Notre association, comme d’autres dans le Morvan et en France, demande un durcissement de la loi. Pour que la directive Natura 2000 soit enfin protectrice et ne souffre pas « d’annexes vertes » qui la rendent inopérante. Pour que la pratique des coupes rases soit interdite en France comme dans de nombreux pays européens. Pour que la priorité soit donnée à une sylviculture en futaie irrégulière à couvert continu qui concilie écologie et économie.

NB/ Le CNPF pointe une inexactitude de notre part concernant la surface de la coupe rase. Notre association suggère à cet organisme d’inviter ses adhérents à rendre publics les plans simples de gestion (PSG) qui définissent le mode d’exploitation des forêts. La transparence  aura le mérite de mettre tous les acteurs du débat au même niveau de connaissance.

NDLR : on vous invite à signer la pétition visant à rentre publics les documents de gestion.

Le communiqué du CNPF (24 juillet 23)

Quelques précisions à propos d’une exploitation forestière récente sur la commune de Villapourçon (Nièvre)

Dans les derniers mois, une coupe rase sur la commune de Villapourçon a entraîné un développement médiatique local tout à fait injustifié. Le Président du PNR Morvan l’a lui même trouvé excessif, en rappelant par un courrier que tout avait été fait dans les règles, et que dans le cas présent, les choix du sylviculteur relevaient d’une gestion raisonnable.

L’exploitation forestière de Villapourçon : les faits

L’exploitation concernée se traduit par une coupe rase sur un total de 7 ha (et non 17 ha comme cela a pu être écrit) à proximité du hameau du Foudon, sur la commune de Villapourçon.
Une première coupe concerne pour 4,5 ha un peuplement d’épicéas attaqué par les scolytes. Conduite durant l’hiver 2021-2022, elle s’est imposée au propriétaire, selon les termes d’un arrêté préfectoral visant à contenir l’expansion de cet insecte ravageur, qui affecte actuellement l’épicéa dans une grande partie de l’Europe. De telles coupes sanitaires concernent massivement le Morvan : ainsi, sur le seul site du Mont-Beuvray, plus de 85 ha de peuplements d’épicéa ont subi des coupes sanitaires depuis 2019.

Une surface quasi-attenante de 2,5 ha a été exploitée durant l’hiver 2022-2023. Elle concerne cette fois un peuplement mixte de chênes et de hêtres de médiocre qualité sylvicole. Cette coupe était prévue dans le Plan simple de gestion (PSG) qui avait été validé en 2020 par le CNPF. Elle sera suivie durant l’hiver à venir par la plantation d’un mélange de résineux (douglas à faible densité) et de feuillus (châtaigniers), conformément aux préconisations actuelles, afin de limiter l’impact des maladies et des attaques de parasites par la diversification des essences. Cette évolution du peuplement, réalisée avec mélange d’essences, est favorable à la biodiversité et à la qualité du paysage. Elle s’inscrit aussi pleinement dans les objectifs de la politique forestière régionale, qui vise notamment la production de bois de qualité, garante d’un stockage du carbone dans la durée.

Ces coupes sont intervenues dans une petite propriété de 17 ha. La mise en place d’un PSG résulte de la volonté du propriétaire de mettre en place une gestion durable de sa forêt, alors que le dispositif PSG ne s’impose qu’à partir de 25 ha. Le reste de ses terrains, soit environ 9 ha de peuplements feuillus, continuera à être exploité en forêt irrégulière sans coupe rase et sans plantation de résineux. L’examen du PSG par le CNPF a d’ailleurs permis, en plein accord avec le propriétaire, d’améliorer sensiblement le projet initial.

L’exploitation a temporairement affecté les chemins de desserte, comme c’est parfois le cas, et l’exploitant a conduit les travaux de remise en état qui s’imposaient. Cela concerne notamment un chemin situé en limite d’exploitation, qui est réputé reprendre le tracé d’une voie romaine (et est indiqué comme tel sur la carte IGN).

En matière de protection, les terrains sont en partie concernés par la Zone spéciale de conservation Natura 2000 « Bocage, forêt et milieux humides du Sud Morvan », qui couvre une vaste étendue de plus de 50 000 ha sur la bordure sud du massif. Les contraintes de préservation de la biodiversité qu’impose Natura 2000 ont été prises en compte par le CNPF lors de l’instruction du PSG. De façon plus précise, le remplacement du peuplement d’épicéa par un peuplement mixte douglas – châtaignier est clairement favorable à la diversification du milieu.

L’inscription des terrains dans le territoire de projet du Grand Site de France Bibracte – Morvan des Sommets n’impose aucune mesure réglementaire spécifique. Ce territoire étendu à douze communes constitue l’écrin paysager des sites classés du Mont-Beuvray et du Mont-Préneley – Sources de l’Yonne qui, seuls, sont astreints à une réglementation spécifique de préservation du paysage.
La forêt est également située dans le périmètre du Parc naturel régional du Morvan, mais aucune disposition réglementaire spécifique ne s’impose à ce titre pour les terrains forestiers.

Pour sa part, le CNPF est l’établissement public en charge du développement de la gestion durable des forêts privées : quelque 3,5 millions de propriétaires forestiers pour 12,6 millions d’hectares, soit environ 23 % du territoire et 75 % des forêts françaises. Placé sous la tutelle du Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, ses principales missions sont les suivantes :

– orienter la gestion des forêts privées : il agrée les documents de gestion durable, qui prévoient la gestion d’une propriété sur 10 à 20 ans. Tout propriétaire de plus de 25 ha doit avoir un Plan simple de gestion agréé ;
– conseiller et former : il réalise des études et des expérimentations sur la forêt, puis vulgarise les méthodes de sylviculture auprès des propriétaires en les formant et les informant ;
– regrouper la propriété privée : la forêt privée étant très morcelée, le CNPF regroupe les propriétaires pour réaliser des projets de desserte, mobiliser les bois, regrouper les chantiers d’exploitation, mutualiser les coûts de travaux forestiers…
– répondre à la demande de production en bois : le poste « bois et dérivés » représente depuis longtemps le deuxième poste de déficit de la balance commerciale française. La transition énergétique, et la construction imposent une attention particulière sur la disponibilité future en bois de notre pays.

L’État, à travers les subventions, assure cette vigilance.

D’un point de vue pratique, l’agrément des Plans simples de gestion par le CNPF se conforme aux règles dictées par le Schéma régional de Gestion sylvicole (SRGS). Ce document contient des « Annexes vertes » intégrant notamment les dispositions propres à Natura 2000 et aux sites classés. Une version actualisée du SRGS, en cours de validation au niveau ministériel, contient des règles renforcées au titre des Annexes vertes.

On dit souvent que / En France, il est généralement admis que la forêt repose sur trois piliers, l’un sociétal, le deuxième environnemental et le troisième économique. Il en découle que les forêts sont des espaces de production économique au même titre qu’un pré ou une terre agricole par exemple. Sachant que le pilier économique (tout comme les deux autres d’ailleurs) ne peut être envisagé qu’à travers une forêt saine, durable et en bonne santé.

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