AMAZON : STOP ? ou ENCORE ?

Attac Nièvre aurait dû permettre une plongée dans le monde d’Amazon par une conférence le 30 octobre, annulée pour cause de confinement.
L’annonce disait : « Un modèle à mieux connaitre pour mieux le combattre, à l’opposé de nos objectifs pour le développement d’une économie locale créatrice d’emploi, génératrice de lien social tout en étant compatible avec les impératifs climatiques ».
Puisque le sujet est de toute actualité, avant la reprogrammation de la soirée, voici quelques éléments par écrit.

Première partie (la suite dans 15 jours)

En lieu et place des services de communication d’Amazon, la députée LREM Hélène Zannier, dans une réponse à un collectif local d’Attac, développe à merveille et sur le ton « il est où le problème ? » les idées qui ont infiltré bien des têtes. C’est pourquoi nous les reprenons pour y opposer les nôtres.

« Conscient de la concurrence émanant des plateformes de ventes en ligne, le Ministre, Bruno Le Maire, a cherché une solution de compromis avec les représentants de la grande distribution, du commerce et du commerce en ligne, dont Amazon, …. », écrit-elle à propos de la fermeture des commerces pendant le confinement.

Ramener le problème à toutes les « plateformes de vente en ligne » noie le poisson. Amazon est bien PLUS qu’une plateforme de commerce en ligne. Non seulement Amazon vend tout ce qui est imaginable, mais Amazon fait plus : Il est hébergeur d’autres vendeurs, propose des services de transport et livraisons, est une plateforme de distribution de musique et de vidéos, est producteur de films, est propriétaire de gigantesques data centers (service stockage de données numériques), est une épicerie, développe et vends des équipements électroniques (« Alexa »), a développé et vend une liseuse (« Kindl ») ainsi que des livres électroniques, et le dirigeant du géant a des projets … de colonisation de la lune (financement à l’appui !). Dans la plupart de ces domaines il est leader sur le marché mondial. Même pour les grandes marques qui, jusqu’à maintenant, façonnaient seules et à leur manière le modèle de consommation et donc la société entière, le succès d’Amazon est un cauchemar (la publicité pleine page d’Intermarché « Désolé Amazon », parue dans la presse locale, en témoigne). 

Mais la nature tentaculaire d’Amazon est surtout un cauchemar pour nous, les citoyens. Sous nos yeux, avec nos « clics », notre société est en train d’être modelée par une seule multinationale.

« Suite à des échanges avec les commerçants et artisans de ma circonscription ce weekend, nous avons identifié que le problème n’était pas tant Amazon qu’une réouverture rapide des commerces et une réorganisation des systèmes de vente de chacun … Il faut également aider et accompagner nos commerces dans la mise en place de solutions numériques et inviter de nouveaux systèmes de livraison. », poursuit-elle. 

Amazon n’a pas attendu Hélène Zannier. Il s’y applique déjà, et avec succès. « Nous voulons aider les commerçants à faire leur transition digitale et à rejoindre la boutique dédiée aux vendeurs français » (Frédéric Duval, directeur d’Amazon pour la France). Déjà actuellement plus de 58 % des ventes d’Amazon se font sur sa place du marché, le « marketplace ». Plus les commerces physiques sont acculés par la concurrence d’Amazon, plus ils pensent de ne plus avoir d’autres choix que de vendre … par Amazon.  Bien sûr que ce choix n’est pas gratuit : 15 % de commission sur toutes les ventes, frais d’abonnement, frais de stockage, frais de pub pour paraître en haut de l’écran, conditions unilatéralement dictées par Amazon.

Les commerces de proximité subissent des faillites en cascade, et pas seulement pendant les confinements.  Conséquences : Dévitalisation de nos centres villes, recul de la proximité et des rencontres sociales, amputation des recettes fiscales locales.

Le marketplace génère d’autres problèmes encore : le non-respect des droits de garantie, le non respect de l’obligation de reprise de déchets électroniques, une fraude massive sur la TVA.

« Je ne pense pas que le débat se place pour ou contre Amazon. Outre le fait que ce soit une entreprise privée et, par conséquent l’État n’a pas la main dessus, il est important de noter qu’Amazon emploie 9 300 personnes en CDI et environ 130000 emplois découlent de cette activité. Amazon fait partie de notre écosystème. », penses-t-elle tout haut.

Ah, l’entreprise privée ! Quel aveu de cette élue, représentante d’un État impuissant devant les multinationales. Pas foutu de refuser des permis de construire pour les entrepôts d’Amazon (plutôt leur faire cadeau des

routes et ponts y menant !). Un État incapable de tracer et poursuivre les fraudes fiscales, imposer des règles de fonctionnement pendant le confinement (ce sont les syndicats des salariés qui l’avaient réussi lors du premier confinement), contrôler et faire appliquer le droit de travail, empêcher une situations de monopole.

Et le chantage par l’emploi ! Une étude de janvier 2020 aux Etats-Unis (très « avancés » en la matière) montre qu’un emploi créé chez Amazon est responsable de la destruction de 4,5 emplois dans le commerce traditionnel.  L’étude française de M. Mahjoubi, député parisien, chiffre le rapport à 1 emploi d’Amazon = 2, 2 emplois détruits. Ce chiffre va aller à la hausse par l’utilisation de plus en plus importante de robots dans les entrepôts d’Amazon : celui de Brétigny-sur-Orge est déjà équipé de 4 000 robots (chiffre de 2019).

Symbiose entre Amazon et notre écosystème(on a du mal à écrire les 2 mots dans la même phrase !)? Il y a bien un lien, mais il est destructeur. 

Le dumping sur les prix, boosté par les « clics » sur Amazon, est le premier facteur d’une immense surproduction, rendue possible par une extraction des ressources naturelles démultipliée. Des armadas de cargos, avions, camions portent la marchandise à travers le monde vers le pays destinataire ; un trafic incessant de poids lourds et voitures l’achemine des ports et aéroports aux centres de stockage, de là aux centres de distribution, de là au client ou aux « lockers ».

En 2018 Amazon a détruit près de 3 millions de produits neufs, invendus pour lesquels personne ne veut payer le stockage.

Et quelques chiffres sur les vertus des « data-centers » (centres de stockage des données numériques) : les data-centers consomment 1% de l’énergie mondiale, autant que les 90 pays les moins consommateurs réunis. En 2018 les data- centers ont généré autant de gaz à effet de serre que le Portugal. Amazon Web Services contrôle près de la moitié de ce marché mondial très convoité.

Une seule conclusion :

ATTAC 58 (attacnievre@gmail.com)

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