Quelques extraits du rapport au 1er ministre de Jean-Yves Caullet, député maire d’Avallon en juin 2013 (devenu depuis président de l’ONF).
« Ce serait un grave paradoxe que l’utilisation d’une énergie, en principe renouvelable, pour lutter contre les effets climatiques néfastes des énergies fossiles, aboutisse à un affaiblissement de l’efficacité de la forêt en portant atteinte au caractère renouvelable de ladite ressource. »
« Le creux de production est déjà écrit, mais il pourrait s’aggraver et avec lui le conflit d’usage sur la ressource forestière et le risque de déséquilibre d’une gestion durable. »
« Puisque la forêt, quel que soit son statut, fait partie de notre patrimoine commun, puisque tous les pans de sa multifonctionnalité nous sont indispensables, il est primordial que les conditions de sa mise en valeur soient ouvertes au débat, comprises et partagées. Cette exigence est d’autant plus importante que la durée du cycle de la forêt dépasse le temps d’une génération, et que rien n’est à attendre de la dictature de l’immédiat. (…) Le débat public bien conduit permet en effet l’échange d’informations, l’écoute d’intérêts divergents éclairant la suite du processus, à savoir en premier lieu l’élaboration d’un document intégrateur régional. C’est une façon de sortir le débat sur la forêt et la filière bois d’un « club » restreint où il a naturellement tendance à s’enfermer au détriment de sa lisibilité et donc à terme de sa pertinence. »
Introduction
La forêt est un enjeu majeur pour notre environnement et notre avenir. Depuis Colbert l’État a su peu ou prou préserver la forêt de la surexploitation. L’action de démantèlement de cette politique lancé par Nicolas Sarkozy et prolongée par le gouvernement actuel vise à un objectif unique : mobiliser plus de bois tout en se cachant derrière des jolis mots à la mode comme « développement durable », « environnement » et « gestion multifonctionnelle des forêts ».
Cette politique irresponsable est aggravée par la pression des grosses unités biomasse qui déstabilise le marché et la concurrence chinoise qui rafle nos plus belles grumes et nous importe des meubles…
Cependant la forêt reste le lieu où l’eau reste correcte à boire (sauf dans les zones à sapins de noëls) et où la biodiversité existe encore. Mais la politique actuelle vise tout simplement à faire avec la forêt ce qui a été fait avec l’agriculture. Le Morvan est en première ligne de cette révolution. Cette politique nous conduit directement à la pollution de l’eau, à l’effondrement de la biodiversité en forêt, à la disparition des petites et moyennes structures qui portent encore de nombreux emplois dans les zones forestières et le déstockage massif et brutal du carbone des forêts et des sol forestiers.
Notons aussi que nos députés, qu’ils maîtrisent le sujet et en identifient parfaitement les enjeux comme Jean-Yves Caullet (voir ci-contre) ou qu’ils soient « frondeurs » comme Christian Paul, n’ont pas levé le petit doigt pour défendre une vision moins industrielle de la forêt lors des débats sur la loi de 2014 sur l’agriculture et la forêt. Ils ont même détruit la totalité des amendements positifs introduits par le Sénat suite à l’action de SOS forêt…
La forêt française est-elle sous-exploitée ?
La sous-exploitation de la forêt française, présentée comme une analyse valable pour l’ensemble du territoire et comme le principal problème de la filière, nous semble ne pas être une analyse objective ni prospective à l’échelle du temps nécessaire à la gestion forestière durable. De plus on peut déjà constater dans les massifs les plus exploités de graves problèmes d’accès à la ressource pour les petites unités de sciage alors qu’elles sont viables et qu’elles sont les plus créatrices d’emplois au m3 de bois scié. Un gouvernement responsable devrait prendre des mesures pour limiter la pression sur les forêts et pour garantir l’accès à la ressource des petites unités pour permettre de maintenir ces activités durables, créatrices d’emploi et structurantes pour le territoire. Suite …
La sylviculture actuelle est-elle durable ?
La coupe à blanc se développe comme technique de récolte des bois (la forêt est coupée rase, puis replantée). Elle est dommageable à l’environnement et à l’emploi. Elle est réputée très rentable mais l’est uniquement à court terme. Elle maintient la forêt dans une structure régulière. À l’opposé, la forêt mélangée (essences multiples) conduite en futaie irrégulière (différentes générations d’arbres), en recherchant et maintenant un capital sur pied favorable à la régénération naturelle, préserve le mieux l’avenir tout en dégageant des revenus réguliers et des emplois qualifiés. La durabilité des plans de gestion devraient être jugées selon ces différentes pratiques sylvicoles. Derrière un discours environnementaliste, les mesures concrètes de la loi de 2014 ne visent qu’à accroitre la mobilisation du bois au détriment de l’environnement et de la biodiversité. Suite …
Scieries : la France sacrifie l’avenir
Les choix technologiques et stratégiques que prend l’industrie du sciage présentent des risques économiques importants en termes de destruction d’emplois pour l’ensemble de la filière avec un impact sensible sur l’écologie forestière. La loi de 2014 semble faciliter cette stratégie sans chercher à instaurer la régulation nécessaire à la préservation de l’avenir économique de la filière et écologique de la forêt. Suite…
La forêt des abatteuses tue la forêt des hommes
On constate sur le terrain que la multifonctionnalité et l’intérêt général dans la gestion et l’exploitation forestière régresse. Si on veut continuer de gérer la forêt dans le cadre de l’intérêt général et en respectant les générations futures comme c’est l’esprit de la loi depuis l’ordonnance de 1349, renforcée en 1669 par celle de Colbert, puis du code forestier, le projet de loi ne doit pas rester en l’état. Il faut renforcer la transparence et la concertation avec les acteurs locaux sur la gestion forestière. Il faut introduire des leviers pour que les stratégies forestières prennent mieux en compte les chartes forestières de territoires et schémas régionaux de cohérence écologique. Suite …
La biomascarade du business vert
Les grosses unités biomasse de production d’électricité déstabilisent le marché en bénéficiant du rachat bonifié de l’électricité et de subventions. Les investisseurs sont nombreux à vouloir profiter de la manne financière. Mais les plans d’approvisionnements sont incohérents, très vastes, voire faisant appel au marché mondial. Ils se chevauchent et sont au final très négatifs en termes de bilan carbone, objet du rachat bonifié d’électricité ! Ces grosses unités énergétiques, mais parfois aussi les grosses scieries industrielles ne tiennent pas compte des projets engagés localement et sont en concurrence frontale et déloyale avec d’autres industries usant de la même ressource. La pression qu’elles mettent sur les ressources locales n’est pas compatible avec les capacités de production durable de la forêt. Cette situation n’est pas tenable, il faut une gestion nationale des projets en concertation avec les territoires et des plans d’approvisionnement précis, locaux, durables ainsi qu’un bilan carbone cohérent de l’amont à l’aval. Suite …
À lire aussi sur Yonnelautre l’entretien avec Jean-Yves Caullet et la réponse d’Adret Morvan
Entretien avec Jean-Yves Caullet, président du Conseil d’Administration de l’Office National de la Forêt
http://yonnelautre.fr/spip.php?article7845&lang=fr
+ lien téléchargement des 2 numéros sur la forêt de l’écho des adrets