Le massif forestier du Morvan a connu de fortes pluies depuis le début de l’année. Les sols gorgés d’eau rendent difficile l’exploitation du bois et les entreprises forestières de la Nièvre se plaignent d’une baisse de leur chiffre d’affaire selon un article du JDC. Nous avons demandé quelques précisions sur l’impact de ces intempéries à Thierry, adhérent d’Adret Morvan, en charge des circuits courts bois pour l’association.
Tout d’abord, pour lui, les pluies actuelles sont bénéfiques pour la forêt. Même si cela ne compense pas les effets des sécheresses des années précédentes, il s’agit d’un répit bienvenu pour les arbres. Concernant les travaux forestiers, les sols détrempés ne permettent pas l’utilisation de machines. Ils rendent notamment impossible toute activité de débardage du bois afin d’éviter la destruction du sol que cela occasionnerait.
Pourtant des alternatives moins impactantes pour le milieu et plus écologiques existent comme le débardage par câble ou à cheval. Cette technique de débardage par traction animale, bien qu’onéreuse, est d’un grand intérêt en cas d’engorgement des sols et pourrait être utilisée pour le débardage d’arbres déjà abattus comme les hêtres et les épicéas. En effet, ces derniers, contrairement aux chênes et aux Douglas, ne peuvent attendre très longtemps en forêt après abattage sans perdre de leur valeur.
Thierry a pu constater de son côté que par temps sec, une exploitation raisonnable laisse peu de trace au niveau du sol forestier. Il est donc important d’attendre des conditions climatiques plus clémentes d’autant plus qu’une exploitation peut sans problème être reportée de plusieurs semaines voir de plusieurs mois si nécessaire. D’un point de vue purement sylvicole, sauf en cas de crise sanitaire, il n’y a pas d’urgence à intervenir. Ainsi dans les PSG (Plan simple de gestion : document permettant aux propriétaires forestiers de planifier la gestion de leur forêt) les exploitations peuvent être décalées de plus ou moins quatre ans.
Au final, les plus impactés par les fortes pluies sont les exploitants et en premier lieu les petites structures. Nous avons rencontré le coordinateur des ETF du Morvan qui a expliqué que les petits exploitants n’ayant pu travailler correctement depuis plusieurs mois devaient quand même honorer leurs traites ce qui occasionne chez certains d’entre eux des difficultés de trésorerie. De plus les banques ne les suivent pas quand il s’agit d’investir dans du petit matériel au prétexte qu’il n’y aurait pas assez de rendement. Par conséquent, pour sortir ces petits exploitants de l’ornière, il faudrait que les donneurs d’ordre (propriétaires, scieries ou négociants) acceptent de mieux les rémunérer.
Le changement climatique a déjà un fort impact au niveau mondial et le Morvan n’y échappe pas. Il est donc indispensable de repenser notre rapport à la forêt et d’adapter nos modes d’exploitation.
Pour Thierry la méthode Pro Silva est la plus adaptée pour faire face aux dérèglements climatiques : sylviculture à couvert continu, pas de coupes rases mais de faibles prélèvements environ tous les sept ans pour les résineux et dix à douze ans pour les feuillus, tout ceci en intervenant bien entendu dans la bonne fenêtre météorologique.