Avec une soixantaine de projets, le département bourguignon assiste à l’afflux de panneaux solaires sur des parcelles agricoles exploitées. Une dynamique encadrée par la chambre d’agriculture mais combattue par la Confédération paysanne et de nombreux riverains.
Dans un froid piquant, au pied de l’église romane de Chaluzy (Nièvre), deux artistes miment une scène d’exécution. Un paysan loufoque installé sur une chaise électrique reçoit une décharge fatale : c’est l’allégorie de l’agrivoltaïsme venant sonner le glas de l’agriculture. Par cette saynète jouée devant cinquante sympathisants, il s’agit pour la Confédération paysanne de clamer son opposition à l’installation de panneaux solaires sur les terres cultivables du département.
Ce syndicat s’inquiète de centrales qui transformeraient des paysans en « paysagistes » affairés à entretenir l’herbe autour des panneaux, qui nuiraient aussi aux rapaces et aux abeilles et qui surtout figeraient des exploitations pendant trente ans, quand l’heure est à l’adaptation rapide de l’agriculture au changement climatique, voire aux crises géopolitiques. Le hameau de Chaluzy symbolise leur lutte : « Nous sommes ici sur une belle parcelle céréalière que convoite un promoteur de l’énergie solaire. A côté, se trouve la zone industrielle de Saint-Eloi, dont les vastes friches et toits des entrepôts n’intéressent personne. Quelle absurdité ! Il faut stopper tout ça. » Tous applaudissent.
Un autre projet de 75 hectares, à Germenay-Dirol, cristallise l’opposition. L’investisseur est un important électricien scandinave, qui entend proposer 35 % de l’électricité produite à 160 foyers et six entreprises locales, à très bas tarif. Sous cette future mer de panneaux, il serait question de remplacer le maïs par du foin à « haute valeur énergétique » voué en partie à l’export. Engagée dans les collectifs Adret Morvan et Energie citoyenne 58, la riveraine Christiane Lachaux ne décolère pas. « Je suis retraitée, ancienne secrétaire, j’ai du temps », explique-t-elle.